Nouvelles Publications

André Gaudreault & Laurent Le Forestier, De l’assemblage au montage cinématographique. Instauration et standardisation d’une pratique (PUM, 2022)

Mobilisant une approche résolument technique, attentive tant aux outils et aux gestes qu’aux discours qui les accompagnent, ce livre veut montrer comment une série d’opérations d’assemblage, disséminées tant dans la chronologie que dans l’espace du processus de postproduction des films dits muets, et acquérant au fil des ans des valeurs et des statuts différents, finit par constituer une phase autonome de ce processus, qui se cristallise, avant sa conceptualisation, dans la notion de montage.

 

Extrait

«La structure en six chapitres que nous avons adoptée [doit] être perçue moins comme déroulant une chronologie des pratiques de montage tout au long de la période étudiée que comme visant à expliciter la complexification de ces pratiques, notamment par le jeu des combinaisons entre les différents principes [préparation, réparation, accolement, suppression, intercalation, alternance, accumulation, ordonnancement et raccordement]. En d’autres termes, ces principes ne se succèdent pas en se remplaçant les uns les autres: ils s’agrègent les uns avec les autres et s’affirment les uns par rapport aux autres, certains principes ayant joué un rôle fondamental durant les premiers temps (par exemple l’accolement) pouvant devenir plus secondaires par la suite, en fonction des fluctuations de l’importance relative des uns et des autres. Cette structure vise donc notamment à éviter le piège de l’idée d’une progression linéaire vers la notion de montage, idée qui aurait pu émaner d’une construction plus chronologique de cet ouvrage. Le processus d’autonomisation de la phase de montage, dans le courant des années 1920, ne nous semble pouvoir être pleinement compris qu’en partant du postulat selon lequel l’assemblage de tableaux, à des fins de production de films pluriponctuels, nécessite de mobiliser diverses procédures, d’appliquer différents principes, d’exécuter plusieurs faires, qui, chacun, connaissent de multiples transformations durant cette vaste période, à des rythmes variables, en fonction certes des innovations techniques, mais aussi des besoins et des nécessités socio-économiques de l’industrie du cinéma. […] C’est pourquoi la plupart de nos chapitres couvrent l’entièreté de la période, même si certains, et en particulier le troisième (“Truquer et raccorder”), se focalisent davantage sur les premières années, en raison de l’importance particulière que prennent les truquages durant ces années-là et de la conception très singulière du “raccord” qu’ils engagent. Nous sommes néanmoins conscients que cette histoire non linéaire peut donner l’impression de survaloriser les toutes premières années, puis la période qui suit la Première Guerre mondiale, en négligeant quelque peu la décennie 1905-1915. Mais, comme le montrent les pages qui suivent, cela s’explique essentiellement par l’avènement du long métrage (ou feature film) et par l’obligation qu’il impose de penser différemment tant la production que l’exploitation des films, en faisant surgir dans ces deux secteurs de nouvelles questions relatives à l’assemblage, lesquelles contribuent à n’en pas douter à modifier durablement et profondément les techniques et les pratiques de “montage”.»
(pp. 35-36)

 

Table

Avant-propos du monteur Hervé de Luze

Préface du monteur Walter Murch

Introduction: Assemblage contre montage

Chapitre 1: Raccomoder et rapiécer

Chapitre 2: Abouter et coupler

Chapitre 3: Truquer et raccorder

Chapitre 4: Accumuler et élaguer

Chapitre 5: Alterner et inter(s)caler

Chapitre 6: Ordonner et (encore) raccorder

Conclusion: Montage contre assemblage

 

Avis des membres de Domitor

“En allant au-delà du cas exemplaire d’un Eisenstein ou d’un Griffith, cet ouvrage novateur et unique en son genre décrit les multiples formes de coupe et de collage qui ont façonné la pratique du montage cinématographique. Comment tout cela a-t-il commencé ? Ce livre donne la clé du mystère !” (Tom Gunning)

“Un immense bond en avant dans la recherche, qui remet en question l’idée de l’”invention” du montage cinématographique et qui ouvre des perspectives inédites aux jeunes chercheurs en histoire et en théorie du cinéma.” (Jane Gaines)

“Inattendu voire inespéré mais désormais nécessaire, le livre de Gaudreault et Le Forestier renouvelle en son fond la question du montage au cinéma par l’ampleur de sa documentation historique et technique et par la taxinomie qu’il en tire.” (François Albera)

 

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